Aïoooli,
Je profite de la période favorable que traverse Florian Thauvin pour m'interroger à voix haute à son sujet, au risque d'en énerver certains, car le fait est que ce joueur que j'aime bien, j'étais de ceux qui se sont réjouis de son premier retour dès la saison dernière, commence à devenir une énigme pour moi malgré ses stats actuelles et le regain de considération qui le placerait presque aux portes de l'Équipe de France selon certains observateurs. Sans doute que j'en attends trop, que je manque d'objectivité dans l'analyse, déformé que je suis par le souvenir des grands joueurs que j'ai pu admirer à son poste sur la pelouse du Vélodrome, mais voilà que pour l'instant je reste sur ma faim et que je commence à sécréter quelques doutes sur son potentiel. On pourra m'objecter que Florian n'a que 24 ans, qu'il est encore en phase d'apprentissage du haut niveau, qu'il se remet à peine d'un échec en Angleterre après avoir évolué une saison sous les ordres de Bielsa qui lui faisait une grande confiance, certes, mais lui demandait de fournir trop d'efforts défensifs au détriment du développement de ses qualités offensives. On peut trouver bien des raisons à l'écart qui n'apparaît pas très important entre le Thauvin de sa meilleure période à Bastia et celui d'aujourd'hui à l'Olympique de Marseille, mais je dois m'empresser d'ajouter que je n'ai pas une connaissance parfaite du joueur qu'il était lors de son passage en Corse. J'ai le sentiment que c'est juste maintenant qu'il trouve à l'OM ce rayonnement et cette efficacité qu'il exprima l'espace d'une demi-saison sur l'île de beauté, encore que ce rayonnement qui lui permet de sortir sous les ovations du Vélodrome chaque fois que Rudy Garcia le rappelle sur le banc, il ne nous est donné de le voir que lorsque nous affrontons des équipes plutôt moyennes, soyons gentils, du championnat. Alors qu'est-ce qui me gêne encore chez Florian ? Trois choses essentiellement :
S'il est doté d'une certaine forme de virtuosité, celle-ci apparaît plutôt sur courant alternatif. Il n'a toujours pas cette autorité qu'ont les grands dès la prise de balle, ce sentiment qu'ils inspirent qu'il va se passer quelque chose et affole l'adversaire. Magnusson et Waddle, mais aussi Charly Loubet ou Francescoli, il faut bien les nommer, faisaient passer des frissons de crainte chez leurs défenseurs quand le ballon leur arrivait dans les pieds et que s'annonçait le moment de la banderilla. Et depuis le retour de Payet, on sent cette différence notable entre les deux joueurs.Thauvin ne déséquilibre pas une défense, il n'a pas dans son jeu ce côté perceur de coffre-fort, et chaque fois qu'il se lance dans cet exercice le taux d'échec est encore trop important. Sans doute moins une question de virtuosité que de vivacité. On a une désagréable impression de nonchalance dans ses tentatives, la sensation qu'il ne change pas de vitesse dans sa gestuelle, qu'il n'est pas dans la préoccupation de l'efficacité, ce qui débouche sur un défaut de tranchant. Reprenez-moi si vous pensez que je dis une bêtise mais Florian Thauvin n'est pas un joueur de débordement. Il utilise ses qualités pour que son arrière-droit soit en mesure de centrer dans de bonnes conditions, même s'il fait marquer deux buts en débordant à droite et à gauche à Lorient... Il me semble pourtant en avoir le potentiel mais je me demande s'il n'a pas perdu confiance en lui dans cet aspect du jeu, le un contre un, voire le un contre deux, ces moments qui ont fait la gloire des Magnusson, Francescoli, Waddle.
La deuxième chose qui me gêne, c'est la sensation de lenteur qu'il me donne. Il peut aller vite avec le ballon sur cinq mètres, et c'est déjà pas mal, mais sur une course de 15 à 20 mètres, il me semble qu'il a rarement le dernier mot. Son explosivité souffre sur une plus grande durée et c'est à déplorer chez un attaquant. J'ai la sensation qu'il ne sait pas courir, qu'il ne se sert pas assez de ses fessiers, qu'il ne sait pas tirer sur ses bras, qu'un défaut morphologique l'empêche de prendre de la vitesse. Je pense qu'il peut encore faire des progrès s'il se concentre et travaille sur sa course mais je suis prêt à admettre que je me trompe. Les grands joueurs cités plus haut ne se signalaient pas par une grande vitesse, ils avaient un tel art du déséquilibre de l'adversaire que cela suffisait à leur donner l'avantage. Or, je sous-entendais aussi que Florian n'a pas cette capacité à mettre son adversaire sur le cul, à lui casser les reins en le prenant à contrepied.
La troisième et dernière chose dont il me semble manquer, c'est la méchanceté, l'agressivité, dans le bon sens bien sûr. Je fais encore référence aux mêmes joueurs que plus haut, mais ceux-là avait cette grinta à l'état naturel. Magnusson n'était pas qu'un gentil suédois, un poète du football, non, il bousculait son adversaire, il mettait le pied quand il le fallait, il rouspétait, il l'humiliait. Florian reste plutôt gentil quand il faudrait être plus teigneux.
En fait, je me pose toutes ces questions car si demain, sait-on jamais, un Robben devait arriver, nous constaterions des différences rédhibitoires entre les deux joueurs qui nous feraient préférer le hollandais. Or, si je commençais ce billet en qualifiant d'énigme Florian Thauvin, c'est parce que je ne sais toujours pas pour l'instant si Thauvin n'est plus très loin de son maximum ou s'il recèle au contraire beaucoup de potentiel et de marge de progression. Il est certes paradoxal de s'interroger sur son cas alors que le joueur, de son propre avis, fait sa meilleure saison en Ligue 1, qui plus est à l'Olympique de Marseille, l'un des clubs d'Europe dans lequel il est le plus dur de s'imposer. Mais voilà, je suis satisfait de ce que réalise Florian Thauvin en ce moment, mais le plus souvent quand je l'observe, je suis frustré.
Et vous, qu'en pensez-vous ?
Vive le grand Roger Magnusson !
L'ÉNIGME THAUVIN...
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thierry b audibert
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